Le plan de Paix de Trump : un stratagème pour réélire Trump et Netanyahou?
Écrit par David Cohen, le 27 Janvier 2020
Le président Trump a annoncé que des éléments de son plan de paix pour le Moyen-Orient sera dévoilé le 28 janvier après avoir rencontré le premier ministre israélien Netanyahou et le chef de l’opposition israélienne, Benny Gantz, mais pas Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne (AP).
Les termes du plan Trump
Selon les médias israéliens et le New York Times et suite à des fuites alimentées par des sources israéliennes, le plan de paix de Trump serait la proposition américaine la plus généreuse jamais faite à Israël. En effet, il serait extrêmement favorable aux positions de la droite/extrême droite israélienne et de ses alliés évangéliques américains. En voici les grandes lignes.
Israël conserverait le contrôle militaire des frontières de la Palestine même si le futur État palestinien contrôlerait 80% de la Cisjordanie et 100% de la bande de Gaza. Israël annexerait une partie de la vallée du Jourdain, ce qui en ferait la nouvelle frontière orientale du pays avec la Jordanie. Israël assurerait sa souveraineté sur presque toutes les colonies juives existantes. Jérusalem serait sous contrôle israélien sauf certains quartiers arabes et les lieux saints seraient sous une administration conjointe israélo-palestinienne. L’expansion des colonies à l’extérieur de leurs frontières serait gelée pendant une période transitoire de quatre ans jusqu’ à l’acceptation du plan de paix par les deux parties. Selon l’agence Reuters, Trump n'annoncera les détails du plan qu'après avoir reçu l'adhésion de Netanyahu et de Gantz. Les conditions préalables à un État palestinien seraient la démilitarisation de l’État palestinien, le désarmement du Hamas, la cessation du financement du terrorisme et la reconnaissance d'Israël en tant qu'État juif.
Alors que Netanyahou s est montré enthousiaste au plan de paix, Gantz lui s’ est montré prudent, en déclarant que le Plan, ouvrait la voie aux parties en conflit "pour avancer vers un accord régional et historique". Depuis plusieurs mois, Netanyahu déclare qu'il prévoit annexer la vallée du Jourdain ainsi que les colonies israéliennes de Cisjordanie, alors que Gantz promet lui aussi d’annexer la vallée du Jourdain et les gros blocs de colonies proches de la frontière israélienne, mais dans le cadre d’un accord de paix avec les Palestiniens et les pays arabes voisins.
Pourquoi dévoiler un plan de paix maintenant à quelques semaines des élections israéliennes?
Le plan initial américain était de le publier après qu'Israël ait un gouvernement permanent. Selon l’ancienne représentante américaine à l’ONU, Mme Nikki Haley, les Américains ne pouvaient plus attendre alors que l'impasse politique israélienne se prolongeait avec une 3 e élection en un an. C’était aussi se rapprocher de la campagne électorale américaine pour débattre du plan de paix.
Selon Dennis Ross, l’ancien négociateur américain pour le Proche-Orient, « à court terme, tout ce qui peut permettre de faire diversion» est «bienvenu» pour Trump et Netanyahou, qui font face respectivement à un procès en destitution et une demande d’immunité contre les poursuites judiciaires. Il ajoute que si le Plan prévoit un État palestinien, il «n’aura d’État que le nom», bien en deçà des attentes des Palestiniens qui veulent récupérer tous les territoires annexés en 1967, y compris Jérusalem-Est et une « juste solution » sur la question des réfugiés. En forçant le dévoilement du plan de paix favorable aux thèses annexionnistes et sécuritaires de Netanyahou, en pleine campagne électorale israélienne, Trump s’ingère dans le processus électoral israélien et favorise la réélection de Netanyahou comme l’indiquent les réactions de politiciens et des médias israéliens.
Perspectives de succès du plan de paix
Selon Michael Koplow, directeur du Israel Policy Forum, un think tank américain (lié à la gauche modérée israélienne) «Vous ne pouvez tout simplement pas avoir une discussion sérieuse sur un plan de paix israélo-palestinien et inviter seulement une partie à venir en parler ». Selon l’'ancien ambassadeur des États-Unis en Israël sous l’administration Obama, Dan Shapiro, « aucune future administration démocrate n'accepterait le plan et ne serait lié par celui-ci ».État. Cela représente aussi le consensus de la communauté internationale.
L’AP, qui a coupé les ponts avec l’administration Trump depuis la reconnaissance de Jérusalem comme capitale d’Israel, est, sans surprise, vivement opposée au plan de paix. L’AP menace, pour une énième fois, de dissoudre l’AP afin de laisser aux Israéliens le soin d’administrer la Cisjordanie.
Même si le Plan est favorable aux positions des partis et groupes de droite/extrême droite, il exige des concessions du gouvernement israélien telles que la création d’un État palestinien et le transfert aux Palestiniens de territoires occupés par les Israéliens.
Selon les médias israéliens, Trump s’attend à ce que l’AP rejette le plan de paix et qu’Israel l’accepte, ce qui permettrait à ce dernier d’annexer une partie de la Cisjordanie après la période de transition. L’AP espère que ce plan sera rejeté par la communauté internationale, et par une future administration démocrate d’ ici un an. En effet, cela est possible. Mais que se passera-t-il si Trump est réélu et que la droite israélienne remporte les élections en mars prochain grâce au coup de pouce de Trump, un scenario possible ? Dans ce cas, le plan Trump aurait le vent dans les voiles tout comme les perspectives de violence en Israel et dans les territoires occupés.