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Répercussions de la reconnaissance de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental par Trump

Dernière mise à jour : 1 mars 2021


La reconnaissance de la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental par le président Trump va à l’ encontre du consensus international et pourrait encourager de futures annexions.


Les termes de l’accord

Le président Trump reconnaît la souveraineté marocaine sur tout le Sahara occidental en échange de l’engagement du Maroc à renouer ses relations diplomatiques et la coopération avec Israël. En retour, les EU comptent ouvrir un consulat au Sahara occidental et offrir de l’aide économique et militaire. De plus, selon la Maison Blanche, un État sahraoui indépendant n'est "pas une option réaliste et une véritable autonomie sous souveraineté marocaine est la seule solution possible".


Contexte

Après l’accord d’Oslo, Israël avait ouvert un bureau au Maroc qui a été fermé suite à la 2e intifada tout en maintenant des relations de faible niveau sous le radar. Le Maroc est le pays arabe qui accueille le plus de touristes israéliens alors qu’Israël renferme une importante population d’origine marocaine (près d’un million) qui a gardé pour plusieurs un certain attachement au Maroc. Le roi du Maroc, Mohammed VI, s’est singularisé au sein du monde arabe en inscrivant dans la constitution que l’apport des Juifs marocains a « enrichi l’identité nationale ».


La question du Sahara occidental

Le Sahara occidental a été annexé par le Maroc en 1975. Depuis, il a fait l'objet d'un conflit territorial entre le Maroc et le Front Polisario indépendantiste représentant le peuple sahraoui. Une insurrection qui a duré 16 ans s'est terminée par une trêve en 1991 et la résolution du Conseil de sécurité en faveur d'un référendum sur l’autodétermination, qui n'a jamais eu lieu en raison de l’opposition du Maroc qui milite en faveur d’une autonomie. Les récentes opérations militaires marocaines pour dégager une route commerciale bloquée par le Polisario près de la Mauritanie pourraient annoncer la fin de la trêve et une reprise des hostilités.


La République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD), proclamée en 1976 ne contrôle qu’une faible partie du territoire, alors que la majeure partie marocaine (les 2/3) renferme des ressources riches en phosphate et en pêcheries. Une vingtaine de pays maintiennent des relations diplomatiques avec la RASD. Le Polisario, bénéficie du soutien actif de l’Iran et surtout de l’Algérie qui a accueilli la plupart des réfugiés sahraouis.


Les réactions

Plusieurs pays arabes ont salué l'accord tout comme la France qui considère « le plan d’autonomie marocain comme une base de discussions sérieuse et crédible ». A l’opposé, le Polisario, l’Autorité palestinienne, l’Algérie, l’Iran, la Turquie et la Russie condamnent l’accord. L'ONU, tout comme l’Espagne, l’ancien colonisateur du Sahara occidental, continuent de soutenir une solution politique permettant l’autodétermination du peuple sahraoui.


Les partis marocains pro-islamistes y compris le premier ministre ont dénoncé la normalisation des liens avec Israël au diapason d’un faible soutien populaire à une telle normalisation.


Implications stratégiques

Le soutien de Trump à la revendication de souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental pourrait compliquer l’espoir d’une solution. Son geste conforte un rapport de force diplomatique de plus en plus favorable au Maroc, notamment dans sa rivalité historique avec l’Algérie.


L’Initiative de paix arabe de 2002 dirigée par l'Arabie saoudite qui propose un État palestinien contre la reconnaissance préalable d’Israël par les états arabes est devenue caduque avec la signature d’un tel accord par le Maroc, le 6e pays arabe à le faire.

Pour le spécialiste du renseignement de Haaretz, Yossi Melman, le rapprochement entre Israël et le Maroc est voué à s’approfondir, dans « un contexte sécuritaire tendu » au Sahara occidental. C’est en fait ce qui inquiète le premier ministre algérien Abdelaziz Djerad qui voit dans cet accord des « manœuvres étrangères visant à déstabiliser l’Algérie. »


Même si les administrations précédentes ont systématiquement appuyé l’ONU dans ce dossier, l’administration Biden se voit contrainte car il lui sera difficile de revenir entièrement sur cet accord sans envenimer ses relations avec Israël et le Maroc.


Conclusion

Aujourd'hui, l'idée d'un Sahara occidental indépendant est considérablement affaiblie et les récentes tensions militaires pourraient s'aggraver. Avec ce nouvel axe Israël-Maroc en voie de cristallisation, l’équilibre stratégique régional est en pleine mutation et fait pencher la balance en faveur du Maroc.


Le soutien de Trump pour un Sahara occidental autonome rejoint son plan pour une Palestine autonome. L’Union européenne (UE) semble divisée sur le sujet. Le positionnement sur cet enjeu de Biden et de l’UE dans les prochains mois devrait nous révéler si l’idée d’autonomie a le vent dans les voiles.


Le geste de Trump signifie que la souveraineté peut être acquise par la force tout comme l’ont été la souveraineté d’Israël sur le Golan et Jérusalem-Est, de la Russie sur la Crimée, de la Chine sur le Tibet et l’occupation du nord de Chypre par la Turquie. Ce nouveau geste conforte la loi du plus fort contrairement au droit international et offre un nouveau précèdent à une éventuelle annexion de la Cisjordanie par Israël.


Il est vrai hélas qu’un certain nombre de pays, surtout non démocratiques, ne respectent pas le droit international. La raison principale est que la violation de ce droit persiste tant que le prix à payer reste soutenable par les pays non respectueux de ce droit.

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